Vingt-septième dimanche dans l'anné A - 1998/1999

Retour

Avec quelle attention, les vignerons soignent les ceps de leur vigne ! Comment ce prophète et grand poète qu'était Isaïe n'y aurait-il pas vu le symbole de toutes les attentions de Dieu pour son peuple ! Israël était la vigne bien aimée de Dieu. Que n'a-t-il pas fait pour elle ? Quels plants de choix n'a-t-il pas soigneusement planté ? Or qu'a-t-il récolté au jour des vendanges ? Les raisins de la déception, les grappes de l'amertume. Que donnent nos raisins au pressoir de cette fin de millénaire ? Saurons-nous, mieux que nos pères dans la foi, répondre à l'amour par l'amour ?

Jésus reprend le thème biblique de la vigne à la fois choyée et décevante. N'est-ce pas, hélas ! , une sorte de raccourci de l'histoire de l'humanité. A chacune de nos eucharisties, nous rappelons le plan de Dieu sur l'homme par les deux thèmes de la création, symbolisée par la joie du vin, et celui de la rédemption, symbolisée par le sang versé.
Ce que Dieu offre à l'homme, dans sa création, c'est comme un vignoble à cultiver, du raisin à cultiver, du vin à goûter… Et le vin, précisément, est un produit du travail de l'homme. Il y faut tout un savoir-faire. Ainsi, l'image du vin nous dit que Dieu n'a pas achevé sa création. Il nous l'a donnée pour que nous l'achevions. Comme le maître de la parabole, il s'est discrètement retiré. Ce retrait n'est pas un désintérêt, mais une façon de mettre en évidence le sens des responsabilités et la liberté de ces hommes que Dieu aime.

A une telle discrétion et à une telle confiance, les vignerons ne répondent que par l'insolence. L'homme d'aujourd'hui comme du temps de Jésus veut se passer de Dieu et gérer la vigne à son seul profit. Il s'en croit le propriétaire et refuse de reconnaître le vrai maître. L'actualité nous montre à suffisance l'horreur de ce crescendo dans l'appétit d'avoir et d'avoir toujours plus. Le libéralisme sauvage et sans retenue, que nous voyons  s'amplifier sur toute la planète, entraîne d'innombrables dégâts humains et écologiques…
C'est alors que joue le second thème de la parabole, celui du sang versé, signe de la rédemption. Les refus obstinés des hommes ne peuvent pas empêcher Dieu de poursuivre son projet d'amour. Il s'obstine à croire en l'homme. Il ose le risque suprême. Il décide d'envoyer son propre Fils : « Ils respecteront mon fils ». Il entreprend la démarche incroyable : l'incarnation.       « Dieu a tellement aimé le monde qu'il lui a donné son Fils unique », dit saint Jean.

Hélas ! Ce fut la tragédie : « Voici l'héritier : allons-y, tuons-le ! » Mais de son sang versé jaillira une aventure nouvelle, la rédemption : « La pierre rejetée des bâtisseurs deviendra la pierre d'angle ». Quand les hommes tuent Jésus, quand tu rejettes Jésus, il continue à être la base solide de tout l'édifice de l'humanité. Seulement, toi, tu peux passer à côté du bonheur offert par Dieu : la vigne portera son fruit, par d'autres, qui boiront le bon vin du Royaume, car l'œuvre de Dieu ne peut que réussir.

Osons nous interroger : n'y a-t-il pas dans nos attitudes, et jusque dans nos engagements, de sournoises tentatives d'être propriétaires de la parole et du pouvoir ? Nous ne sommes que les intendants du Seigneur. Soyons de modestes et de bons gérants de sa vigne.

Retour