Trente deuxième dimanche dans l'anné A - 1998/1999

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La sagesse n'est pas affaire de calculs ou de prophéties : "Vous ne savez ni le jour ni l'heure ». (Mc 13, 32) « Au sujet de la venue du Seigneur, il n'est pas nécessaire qu'on vous parle de délais ou de dates. Vous savez très bien que le Jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit ». (1Th 5, 1) Ne nous laissons pas échauffer l'imagination par je ne sais quel fétichisme de dates.

Etre sage, c'est persévérer dans l'amour. Prenons les jeunes filles de la parabole. Les insensées ont revêtu leurs plus beaux atours et pris leur lampes : un époux normal doit être  l'heure  sinon en avance ! Pourquoi leur faire  le reproche et les punir pour des heures de retard… du marié ! De plus, qu'il est choquant le refus de partager des cinq vierges sages qui, elles, ont pensé emporter une provision d'huile. Réfléchir ainsi, c'est entrer dans une impasse.

Car ce que la parabole veut surtout montrer, c'est qu'il ne suffit pas de bien commencer, mais qu'il faut encore prendre les moyens de durer et de se tenir prêt à tout instant à fêter celui que nous aimons. «Je dors, mais mon cœur veille. J'entends mon bien-aimé qui frappe. "Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe, ma parfaite! Car ma tête est couverte de rosée, mes boucles, des gouttes de la nuit" » (Ct  5, 2) Car l'époux qui se fait désirer n'est autre que le Christ revenu de la nuit de sa passion. Les vierges représentent notre communauté-épouse de Dieu. L'huile est celle du baptême qui a fait de nous les enfants du roi. Le sommeil symbolise toutes nos tiédeurs, nos indifférences et nos morts. Nous passons des semaines et des mois sans penser une seule seconde à Dieu, sans prier. Notre vie devient une existence matérielle, réduite au travail et au plaisir. Pensons aussi à ces invraisemblables marchands qui, à minuit passé, patientent après leurs clientes envoyées par leurs sales petites copines égocentriques. N'évoquent-ils pas plutôt notre société avide d'argent et qui s'entend si bien pour nous étourdir dans une course insatiable aux jouissances narcissiques.

La vie éternelle commence dès aujourd'hui.
Si elle ne se vit pas dès ici-bas, comment pourrait-elle se déployer au-delà ? Mais si, fidèles à la prière et à la charité fraternelle, la petite flamme de notre bonne volonté brille encore dans la nuit des épreuves, alors nous entrevoyons dès maintenant quelque traits du visage bien-aimé. Alors, après les ténèbres de la mort, «nous le verrons tel qu'il est ». (1Jn 3, 2)

Les fiancées folles n'ont pas su être prêtes. Elles ont laissé mourir en elles le désir de Dieu. La lampe de leur cœur ne donne plus la moindre fumée. Elles sont éteintes, mortes. Elles ont pris la liberté insensée de ne pas entrer à la noce. Et pour la rencontre décisive avec Dieu, personne ne peut aimer à leur place.

Ne ratons pas maintenant le rendez-vous de l'amour. N'oublions pas Dieu, notre fiancé. Il faut veiller dans l'espérance, le désir et la prière. « Jésus » dit Jeanne d'Arc en mourant. Et Thérèse d'Avila, cent ans plus tard, murmure en expirant : « Il est temps de nous voir, mon aimé, mon Seigneur ». C'est de l'avoir attendu toute une vie qui leur fait goûter l'ivresse de la rencontre définitive.

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