Quatrième dimanche de carême A - 2007-2008
Après le symbole de l’eau, dimanche dernier, voici celui de la lumière en ce 4e dimanche de carême. La foi est une affaire de regard. Saint Paul nous rappelle que le baptême fait des croyants des enfants de lumière : « Autrefois, vous n´étiez que ténèbres; maintenant, dans le Seigneur, vous êtes devenus lumière; vivez comme des fils de la lumière.»
Dans l’évangile, Jésus dit de lui-même qu’il est la lumière du monde. Tout le récit qui précède cette parole, rapporte comment un aveugle de naissance guéri par la parole de Jésus accède à la lumière de la foi, et comment cette guérison suscite l’aveuglement de son entourage. Guérir les yeux est une chose. Guérir le regard en est une autre. Nos yeux nous permettent de voir le monde, les personnes, les événements. Notre regard est fait de préjugés, au point qu’il nous arrive de regarder les gens et les choses avec un œil mauvais.
Voyons cela avec le récit que nous venons d’entendre. Le regard des disciples qui n’est pas celui de Jésus sur cet aveugle de naissance : « pourquoi cet homme est-il né aveugle? Est-ce lui qui a péché, ou bien ses parents?» C’est ce qu’on pensait en Israël : toute maladie ou infirmité provient d’un péché, même s’il a été commis par des parents.
Jésus, lui, regarde l’infirme comme un frère à qui, en qui, par qui Dieu peut se manifester. Et ce regard donne confiance à l’aveugle. Il va se laver les yeux, et emplir son cœur de la lumière avec laquelle Jésus le regarde. Les yeux de son visage étaient aveugles mais pas les yeux de son cœur. Il a confiance en la parole de Jésus. Le geste de guérison de sa cécité et surtout des regards négatifs sur lui-même, il va l’accomplir, seul, en l’absence de celui qui l’a regardé autrement que tous.
Cependant ceux qui l’ont toujours considéré comme un handicapé et un pécheur refusent de changer leur regard sur lui et vont même jusqu’à dire que ce n’est pas lui. « Ses voisins, et eux qui étaient habitués à le rencontrer - car il était mendiant - dirent alors : «N´est-ce pas celui qui se tenait là pour mendier?» Les uns disaient: «C´est lui.» Les autres disaient: «Pas du tout, c´est quelqu´un qui lui ressemble.» Mais lui affirmait: «C´est bien moi.»
Après l’aveuglement des voisins, saint Jean dénonce de manière assez féroce celui de beaucoup de pharisiens et de responsables religieux. Une mauvaise foi qui provient de leurs principes légalistes D’abord par rapport à Jésus : il n’a pas respecté le sabbat, et donc ne vient pas de Dieu. «Celui-là ne vient pas de Dieu, puisqu´il n´observe pas le repos du sabbat.»
Ensuite par rapport à cet homme aveugle, qui à leurs yeux est un pécheur de naissance et à qui ils veulent faire reconnaître que ce Jésus – qu’il n’a pas encore vu – est un pécheur lui aussi. Ils n’en démordent pas, au point que l’aveugle guéri, avec humour et insolence, ose les placer face à leurs contradictions : « Si cet homme-là ne venait pas de Dieu, il ne pourrait rien faire.»
La très belle conclusion du récit est pour chacun de nous en ce Carême : aveugles de naissance, guéris par le baptême, apprenons sans cesse à voir le monde, les choses de la vie, les autres, nous-mêmes, avec le regard du Christ et la même ouverture de cœur que cet homme. «Crois-tu au Fils de l´homme?» Il répondit : «Et qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui?» Jésus lui dit: «Tu le vois, et c´est lui qui te parle.» Il dit: «Je crois, Seigneur», et il se prosterna devant lui.
Savourons aussi une phrase de la première lecture de ce dimanche, qui dit à propos de David : « Dieu ne regarde pas comme les hommes, car les hommes regardent l´apparence, mais le Seigneur regarde le cœur. »