Quatrième dimanche ordinaire A - 2007-2008

Retour

Les Béatitudes dressent le portrait grandeur nature de Jésus. Elles ne disent rien d’autre  que ce que Jésus a vécu. Le Fils du Père, c’est lui le pauvre de cœur. Il s'est fait doux et humble. Il a pleuré de souffrance et de compassion. Il a fait miséricorde aux pécheurs, et il a témoigné avec courage de la vérité. Il a fait la paix par le sang de sa croix. Il a subi la persécution pour la justice du Royaume, jusqu'au don total.

Loin d’être l’éloge d'une tranquillité passive et béate, les Béatitudes appellent à un engagement concret proposé comme chemin de bonheur. La pauvreté de cœur se traduit comme un refus de se laisser fasciner par l’argent, le pouvoir ou l'orgueil. Elle est choix de vivre libre. La douceur évangélique est rejet de la violence. Elle est accueil de l'autre sans faiblesse mais aussi sans préjugé ni jalousie. Les larmes dont elles parlent ne sont pas celles de la sensiblerie, mais celles d'une compassion qui fait comprendre et entrer en sympathie avec ceux qui souffrent. La pureté de cœur est synonyme de transparence. Elle est exclusion de ce qui brouille le cœur, obscurcit le regard et empêche de « voir Dieu ». Elle fuit la duplicité et le travestissement de la vérité. Faire la paix suppose une volonté de réaliser la réconciliation à l'image du Fils : « C'est ma paix que je vous donne » (Jean 14, 27). L'artisan de paix ressemble à Dieu.

La persécution à cause de Jésus est « subie ». Cependant le fait qu'elle soit la conséquence d'une recherche de la justice du Royaume est l'indice d'un engagement du disciple pour « ajuster » sa vie à l'Évangile, malgré les incompréhensions et les moqueries. Être et se montrer chrétien ne va ni sans courage ni sans lutte ! Bonheur vécu souvent à contre-courant, les béatitudes sont le vrai visage du monde qui vient.

Mais en même temps les Béatitudes s’adressent à chacun de nous. Quand Jésus les proclamait sur la colline de Capharnaüm, il n'y avait certainement pas que des gens parfaits en face de lui. C'est pourtant à ces Marie-Madeleine, Zachée, Pierre ou autres André que Jésus adressait ces merveilleuses paroles.

Merveilleuses parce qu'elles révèlent à ceux qui les entendent un trésor enfoui en eux et qui a pour nom la sainteté : Jésus ne décrit pas ce que ces personnes vivent, il lit ce qu'elles sont à ses yeux à lui. Il révèle le grain de sainteté enfoui en chacun et que ces gens ignoraient - et que nous continuons d'ignorer.

Il dit qui nous sommes aux yeux de son Père. Il dévoile notre identité et notre vocation à l'intérieur même de la médiocrité de nos vies. Il dévoile la présence du bonheur au cœur de nos journées. Il nous donne la clé du bonheur : « Bienheureux êtes-vous... »
Jésus, le Fils de Dieu nous regarde à partir de nos impuissances ! Il nous saisit par notre fragilité. Dans notre faiblesse, il veut mettre sa force. Dans nos larmes, il veut déposer un grain de sa joie. Dans nos pauvretés, il veut  placer sa richesse. Dans notre péché, il veut  offrir son pardon.  Sur nos croix,  il fixe la sienne. Dans notre humanité, il insère sa divinité. Les Béatitudes nous sont confiées aujourd'hui, quelle que soit notre pauvreté, quelle que soit notre honte.

Dans dix minutes, notre célébration eucharistique, va nous les résumer en une seule phrase: « Heureux les invités au repas du Seigneur ». En communiant, nous devenons ce que le Christ annonce de nous, ce que nous recevons : le corps du Christ.

Oui, bienheureux les pauvres, le Corps du Christ est en eux : ils sont le Corps du Christ Bienheureux. Dans l’épaisseur et les ténèbres de nos violences humaines, les béatitudes ne sont pas une illusion qui évacue l’horreur dont l’homme peut être capable. Elles constituent l’antidote, la force d’aimer de Dieu qui, dans la mesure où nous y consentirons, sera plus puissante que le mal.

Retour