4e dimanche dans l'année année A - 2010-2011

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Les béatitudes nous donnent un message paradoxal. Elles parlent de bonheur, mais un bonheur qui va tout à fait à l’encontre du monde. Qui oserait dire bienheureux les pauvres alors qu’on fait tout pour éradiquer la pauvreté ? Qui proclamerait heureux les doux et les pacifiques dans un monde de violence et de lutte sans merci ? Pourtant les Béatitudes sont les clés qui permettent au chrétien d’ouvrir la porte au vrai bonheur de sa vie. Ce bonheur annoncé par le Christ, il faut l’éplucher comme un fruit à l’écorce rébarbative qui ne donne à goûter toute sa saveur qu’après tout un travail. Ce n'est qu’au bout de tout un temps, qu’on peut goûter les Béatitudes. Il faut accueillir en soi ces paroles, les méditer, les prier dans le silence du cœur profond. Nous recevrons alors la grâce de les vivre.

Dom Helder Camara, qui fut l’archevêque des pauvres au Brésil, les commentaient ainsi :

« Que de femmes et d’hommes portent, très souvent à leur insu, l’humanité à naître. Au jour le jour, pauvrement, obstinément, jamais ils ne se résignent à un monde où la richesse des uns grandit avec la misère des autres, Jamais ils n’acceptent à une société où il y a des sans terres, des sans toits, des sans voix. Ceux qu’habite l’esprit des béatitudes cherchent toujours à changer le monde. … On les traitera de rêveurs… Lorsqu’on rêve seul, ce n’est qu’un rêve. Mais lorsqu’on rêve ensemble, c’est le commencement de la réalité. »

Le combat courageux de nos frères tunisiens pour l’avènement encore très fragile d’une vraie démocratie et d’une véritable justice, ne vient-il pas nous le rappeler ? Oui, dans ce monde ivre de violence, perdre sa dignité est encore plus dangereux que de laisser sa peau. Oui, bienheureux sommes-nous si nous puisons dans la sève des Béatitudes la force de briser la spirale absurde de la violence ! C’est ce qu’exprime une prière de Dom Helder Camara :

« … Je ne crois pas au droit du plus fort,
au langage des armes, à la puissance des puissants.
Je ne veux croire qu'aux droits de l'homme,
à la main ouverte, à la puissance des non-violents.

Je ne crois pas à la race ou à la richesse,
aux privilèges, à l'ordre établi.
Je veux croire que tous les hommes sont des hommes
et que l'ordre de la force et de l'injustice est un désordre.

… Je ne croirai pas que la guerre et la faim
soient inévitables et la paix inaccessible.
Je veux croire à l'action modeste et aux mains nues.

… Je ne croirai pas que le rêve de l'homme
restera un rêve et que la mort sera la fin.

Mais j'ose croire, toujours et malgré tout,
à l'homme nouveau.
J'ose croire au rêve de Dieu lui-même :
un ciel nouveau et une terre nouvelle où la justice habitera. »

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