Solennité de l'Ascension A - 2010-2011

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Le mystère de l’Ascension est un mystère d’absence et de présence. Le monde d’aujourd’hui semble plus sensible à l’absence qu’à la présence. Il a même dénaturé l’absence de Jésus ; Jésus la voulait féconde et bienfaisante, elle est devenue mortifère et angoissante.

L’absence de Jésus s’est transformée en absence de Dieu. . L’homme moderne semble livré aux déterminismes de tous ordres, psychologiques, sociologiques ; sa liberté est devenuedésespérante, et il n’y a plus en lui de mystère. ; il n’y a plus d’éternité ; l’homme semble avoir évacué de lui-même et de son horizon toute profondeur autre qu’humaine. Des philosophes nous invitent à vivre une spiritualité athée. Il y a longtemps que Niersche a proclamé, douloureusement d’ailleurs, que cette absence de Dieu était définitive : « Dieu est mort » en ce monde.

Une grande spirituelle française du 20ème siècle, d'ailleurs convertie de l'athéisme, Madeleine Delbrêl, s’écriait, en des termes à peu près équivalents : « Y a-t-il quelqu’un qui contestera cette mort » ? C’est-à-dire : Y a-t-il une voix qui s’élèvera pour proclamer le nom de Jésus dans vide ?

Il y a des mystiques chrétiens qui communient mystérieusement, dans l’obscurité de la foi, à ce vertige du vide, à cette solitude sans issue, à cette angoisse d’un monde fermé : Thérèse de Lisieux, alors qu’allait s’ouvrir le 20ème siècle ; Mère Thérésa alors que s’ouvrait le 21ème siècle ; l’une et l’autre assises à la table des pécheurs, des incroyants, de ceux qui sont les plus pauvres, les plus abandonnés, parce qu’ils manquent de l’essentiel.

Mystère de l’absence du Christ. Il avait dit pourtant : « il vous est bon que je m’en aille. » « Je ne vous laisserai pas orphelins. » « Je vous enverrai l’Esprit-Saint…il vous conduira vers la vérité tout entière. » Il vous rassemblera en Eglise ; il vous fera vivre en frères. Il vous fera chercher et trouver les chemins de l’annonce de l’Evangile. Il habitera ma Parole selon laquelle il vous façonnera. Il habitera les sacrements dont il sera pour vous à la fois l’acteur et le fruit sans cesse disponible à la quête de votre foi.

Mystère d’une présence discrète, invisible à d’autres yeux que ceux de la foi, et grâce à laquelle nous avançons au cœur de ce monde à la recherche du seul visage qui vaille la peine d’être contemplé : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » Et nous voici comme des voyageurs émerveillés de cette lumière découverte au fil des jours dans le partage fraternel et la prière humble et tenace. Nousdevenons forts de cette présence qui se révèle souvent dans la faiblesse.

 Et nous pouvons alors sans crainte prononcer dans le vide laissé par le rejet de Dieu le nom de Jésus, ce « nom qui est au-dessus de tout nom. » Il faut oser le proclamer avec humilité et respect. Non pas en ajoutant du tintamare au bruit infernal où s'étourdit et se perd l'homme moderne. Mais en prononçant le nom de Jésus à partir du silence du coeur profond que crée l'amour, la prière fidèle, la compassion et la bonté discrète. Car seul l’amour vrai, celui qui naît d'un cœur habité par Dieu, fait entendre la source où se murmure le nom de Jésus.

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