Troisième dimanche dans l'année B - 2003
Ce qui frappe tout d'abord dans ce passage de l'évangile de Marc, c'est la rapidité avec laquelle Jésus passe au bord du lac, annonce la Bonne Nouvelle et engage ses premiers disciples. On dirait qu' « il y a le feu » ! Il y a une urgence qu'il nous fait sentir. Pas de grands discours : des actes, des gestes. Le mot « aussitôt » revient deux fois dans ce texte. Jésus n'attend même pas que les gens aient terminé leur travail. Au contraire, c'est au beau milieu de leur travail que Jésus s'adresse à eux et qu'il leur dit : « Venez avec moi ». Il y a urgence d'annoncer partout que le « Règne de Dieu est là ». Il y a urgence de se convertir pour s'ouvrir à la Bonne Nouvelle, pour pouvoir, ensuite, l'annoncer et travailler à la réaliser dans les faits.
Jésus s'adresse à nous aussi, par l'intermédiaire du Livre de la Parole, mais avec la même insistance, pour nous dire : « Il y a urgence. » Pour nous désinstaller. Pour nous empêcher de rester bien tranquilles dans notre petit confort. Il nous invite à marcher avec lui, à le suivre pour annoncer à notre monde que le Règne de Dieu est là et qu'il faut l'accueillir.
Je suis certain que notre première réaction, si nous prenons au sérieux cet appel, sera une réaction de surprise. Pourquoi est-ce tellement urgent ? On aurait envie de répondre : « il n’y a pas le feu ! »
Or Jésus nous répond : « Mais si, justement, il y a le feu ! » Parce que si nous continuons à vivre comme nous vivons aujourd'hui, nous ne verrons jamais l'approche du monde nouveau qu'il faut commencer à réaliser. Croire, c'est être certain qu'il y a beaucoup de choses à changer dans notre monde et qu'on peut changer quelque chose. Ne pas être résignés, sceptiques, moroses. Si tu renonces, le monde dans lequel tu vis restera toujours le même : un monde d'injustice ; un monde où des milliers d'enfants meurent de faim ; un monde où règnent la guerre, la violence, la discrimination raciale, les discriminations de toutes sortes ; un monde où le fort écrase le faible ; un monde où beaucoup de gens, en cet instant, pleurent de misère et de souffrance.
Le discours de Jésus est extrêmement bref. Mais les actes qu'il va poser, et dont on lit la relation dans la suite de l'évangile de Marc, sont des signes qui indiquent bien sa volonté de manifester la naissance, dès aujourd'hui, de ce monde nouveau où il n'y aura plus un seul homme qui souffre, un seul humain qui pleure.
Posons-nous simplement la question : dans notre vie, qu'est-ce qui compte le plus, pour chacun de nous, aujourd'hui ? Pour l'un, ce sera sans doute le désir de réaliser un grand amour. C'est bien. Pour un autre, le plus important, c'est sa profession. D'accord. Pour celui-ci, l'important, c'est de trouver du travail. Normal. Un autre vit avec ses soucis, ses peines. Avec sa maladie, ses souffrances, ses ennuis, son grand âge. Il y a tout cela, qui fait la trame de notre existence. Et voilà que Jésus dit à chacun de nous, aujourd'hui : « Tu vois, si tu mets tout cela en premier dans ta vie, tu passes à côté du Royaume de Dieu. Il te faut relativiser tout cela. »
Pierre et André, Jacques et Jean auraient pu dire à Jésus qui les appelait : « Eh ! Laisse-nous d'abord terminer notre travail ». Non ! Ils ont compris que cela, ce n'était pas l'absolu de leur vie, qu'il y avait quelque chose de plus important que leur travail, que leur vie familiale, que leurs amours, que leurs peines, que leur sueur, que de gagner de l'argent. Ils ont compris qu'il y avait quelque chose de plus important : le Règne de Dieu à accueillir, à annoncer, à promouvoir.
A chacun de nous aujourd'hui, le Seigneur adresse le même appel. Il nous demande de changer de vie, et ainsi, de changer la vie. Pas besoin, pour cela, d'aller loin. Il s'agit d'abord d'avoir un autre regard sur les événements, les personnes. Ouvrir notre regard. Nous nous apercevrons d'abord qu'il y a beaucoup de gens qui travaillent au Royaume de Dieu, même sans le savoir. Et nous serons encouragés à travailler, à la suite du Christ et avec tous les frères, pour instaurer un monde de justice, de paix et d'amour.