Sixième dimanche ordinaire B -2006

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« Mon modèle à moi, c’est le Christ. » Voilà qui est clair. Telle est bien l’originalité chrétienne : prendre pour idéal d’humanité réussie l’humble prophète de Nazareth.

Les transgressions de Jésus

Saint Marc n’hésite pas à nous présenter Jésus comme transgresseur de la Loi de Moïse. Que l’on se rappelle les discussions à propos du Sabbat. Ce qui est premier pour le Christ, c’est la communion entre les hommes. Qu’il n’y ait donc plus d’exclusion. Au nom de la communion entre tous, Jésus n’hésite donc pas à transgresser les lois les mieux établies. Non que la loi soit inutile, mais elle produit parfois des rejets. Celle du Lévitique un excellent exemple. Le lépreux devait porter « des vêtements déchirés et les cheveux en désordre », crier « Impur ! Impur ! » et se tenir « à l’écart ... hors du camp », privé de communion avec ses semblables.

Face à ce qu’il faut bien appeler une injustice, Jésus se met « hors la loi. » Il réagit de manière responsable. Il nous arrive aussi de transgresser des lois, mais en général à notre avantage. Le but de Jésus est autre et c’est en cela que saint Paul veut l’imiter : « En toute circonstance, je tâche de m’adapter à tout le monde, dit saint Paul. Je ne cherche pas mon intérêt personnel, mais celui de la multitude. »

Regardez Jésus : il se laisse approcher par celui qui devrait de lui-même se tenir à l’écart. Et Jésus va plus loin : il le touche, d’un contact physique, de ce baiser au lépreux que nous sommes ! Et du coup, il se retrouve du coup de l’autre côté de la barrière. Posant la main sur l’homme atteint de lèpre, il est devenu le lépreux. Il ne peut plus entrer dans les villes ouvertement. Il doit se tenir « dans des lieux retirés. » Et sa compassion ira plus loin encore. Jésus mourra au Golgotha, cette colline en dehors de la ville. Il sera mis au rang des malfaiteurs. Et sur la croix, défiguré comme un ladre, il verra tous se détourner de lui.

Aujourd’hui

Aujourd’hui, les exclusions ne sont-elles pas multiples ? N’y a-t-il pas multitude d’exclusions économiques, culturelles, politiques, morales ? Quelles sont donc les lèpres d’aujourd’hui ? En ces temps où l’on parle de mondialisation, il est urgent de nous rappeler qu’il y a une frontière à laquelle nous nous sommes hélas trop habitués, celle entre le Nord et le Sud. Tout le monde, en effet, ne profite pas de la même façon de cette société de consommation. Des peuples entiers, et ils sont majoritaires, sont exclus du club de la chance. N’y a-t-il pas aussi un peu de cela dans les réactions démesurées d’Islamistes à propos de caricatures de Mahomet ? Saurons-nous transgresser les frontières d’exclusion et, comme Jésus, choisir nos solidarités avec les rejetés de nos systèmes économiques, ethniques, culturels, religieux et moraux ?

Le visage de Dieu

Quel visage saisissant de Dieu nous est révélé aujourd’hui ! « Qui m’a vu a vu le Père », disait Jésus. Lorsqu’on le contemple qui étend la main et touche le lépreux, on comprend que désormais, il n’y a plus de distance entre Dieu et l’homme. Même celui qui peut apparaître le plus lointain est rejoint par le Dieu fait homme. Jésus, en effet, a touché les lépreux, rencontré les possédés ; il s’est assis à la table des pécheurs et il est mort entre deux malfaiteurs. Il n’est pas de détresse, aussi désespérée soit-elle, dont Jésus n’ait voulu partager la nuit. Et dès que quelqu’un nous rejoint dans notre solitude, déjà celle-ci s’estompe. 

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