Deuxième dimanche dans l'année B - 2012

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Les lectures de ce dimanche nous parlent de la rencontre avec Dieu grâce à des intermédiaires. Ainsi en va-t-il du vieux prêtre Éli qui apprend à l’enfant Samuel à écouter la Parole de Dieu. De même, Jean-Baptiste désigne à ses disciples « l’agneau de Dieu ». L’un et l’autre, montre le chemin. Mais l’un comme l’autre s’efface pour voir leurs disciples, comme de dos, entrer dans la relation indicible avec Dieu. Ils les introduisent au seuil, puis se retirent sur la pointe des pieds…

Telle est bien notre mission de baptisé : conduire discrètement et respectueusement les autres au seuil du sanctuaire de leur cœur profond, là où Dieu demeure. Inutile donc de chercher au dehors Celui qui nous est plus intime à nous-mêmes que nous-mêmes. C’est ce qu’avoue saint Augustin dans ses célèbres « Confessions » :

« Bien tard je t'ai aimée, ô beauté si ancienne et si nouvelle,
Bien tard je t'ai aimée !
Et voici que tu étais au-dedans, et moi au-dehors… »
(Confessions, livre 10)

C’est désormais là, au plus profond de nous-mêmes que Dieu nous est présent. Après la lecture de saint Augustin et des évangiles, la jeune juive hollandaise Etty Hillesum écrivait en 1941, deux ans avant da mort à Auschwitz : « Il y a en moi un puits très profond. Et dans ce puits, il y a Dieu. Parfois, je pensais à l'atteindre. Mais le plus souvent des pierres et des gravats obstruent ce puits et Dieu est enseveli. Alors il faut le remettre au jour ».

Comment remettre au jour cette source cachée, cette fontaine scellée ? Déjà en repassant dans notre cœur les lectures de ce jour. La première, à travers le récit de la vocation de Samuel, nous montre que c’est parce qu’il avait un cœur qui écoutait que Samuel put entendre la Parole de Dieu.

Dans la seconde, saint Paul parle du lien mystérieux qui unit l’aventure intérieure à notre manière de vivre. On ne peut approcher Dieu sans mettre notre vie concrète en harmonie avec notre recherche spirituelle.

Dans son Evangile, enfin, saint Jean montre que c’est en interrogeant Jésus, en scrutant sa Parole, et en nous mettant à sa suite, que nous pourrons découvrir ce lieu où Il demeure dans le sein du Père et que nos pouvons atteindre, en Lui, en plongeant au centre de notre être.

Connaissez-vous l'héroïsme et la souffrance du poète Charles Péguy ? Il s’est converti, mais sa femme, qu’il a épousée civilement et avec qui il a eu quatre enfants, ne veut pas en entendre parler. Pour communier, il devrait se marier à l’église et faire baptiser ses enfants. Ses amis, comme le philosophe Jacques Maritain, lui disent : « Enfin, ta femme, tu n’as qu’à la forcer ». Mais Péguy répond : « Ma femme dit : Non ! Ce sera non ! Je la respecte ». En plus, à ce moment-là, il tombe amoureux d’une autre femme : Blanche. Et ses dévots amis osent lui dire : « Tu n’as qu’à changer ! Pour l’Eglise, vous n’êtes pas mariés ! » Pétrifié de douleur, Péguy tient bon et reste fidèle. Il rompt avec Jacques Maritain, par respect pour son épouse. Il meurt au début de la bataille de la Marne, en septembre 1914. Plus tard, sans aucune pression, madame Péguy, athée et fille d’une compagne de Louise Michel (la Commune de Paris, 1871),après avoir fait le pèlerinage de Chartres que lui avait demandé son mari, se convertira en 1926 après avoir fait baptiser leurs enfants en 1925. Charles Péguy aura été le vrai précurseur de la rencontre infiniment respectueuse entre le Christ et Charlotte Baudouin, son épouse. Ayons la même délicatesse… (http://www.revue-resurrection.org/Peguy-et-Maritain-le-conflit-de)

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